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L'art du bronze

Le Démocrate · 25 novembre. 1992

Travaux pratiques avec les maîtres du feu

L'art du bronze, en particulier la technique dite à la "cire perdue", existe depuis plusieurs millénaires, mais peu de gens à l'heure actuelle, connaissent réellement le processus de fabrication. A Bonnières-sur-Seine, la fonderie d'art Fleurant, dont les ateliers sont situés dans les locaux de l'ancienne usine Singer, est spécialisée dans la réalisation de sculptures en bronze, précisément selon cette technique

Installée depuis plus de deux ans, Alain Brieu et son associée Patricia Rodriguez, collaborent afin de créer de formidables sculptures en bronze.

Depuis quelques mois, Thierry Briand s'est joint à l'équipe.

Ces "maîtres du feu", comme on les appelait jadis, travaillent véritablement en symbiose avec l'artiste, le créateur. C'est à partir d'un modèle façonné par l'artiste, que le fondeur va pouvoir exercer son art. Il est difficile d'imaginer la masse de travail nécessaire à la réalisation d'un bronze d'autant plus qu'Alain Brieu estime que "l'on ne doit plus voir l'effort une fois l'oeuvre exposée".

Afin de mieux comprendre la démarche du fondeur, nous avons tenté de résumer étape le mécanisme de fabrication.

 

La cire et sa préparation

L'artiste remet au fondeur le modèle qui peut être en n'importe quel matériau. Celui-ci prépare un moule, généralement en élastomère. Il fait fondre de la cire, en enduit l'empreinte du moule avec un pinceau.

Après il referme le moule et le remplit de cire, puis le vide pour souder les parties enduites au pinceau. Il remplit ensuite l'intérieur de matière réfractaire (le noyau); un mélange de plâtre, briques pilées, sable, dans des proportions, dont seul le fondeur à le secret.

Après ouverture du moule, nous nous trouvons donc en présence d'une reproduction en cire du modèle initial.

L'artiste peut alors retoucher la cire, pour raviver certains détails. Il signe et numérote son oeuvre.

Par la suite, le fondeur réalise le réseau de jets et d'évents, les premiers assurant l'alimentation en bronze, les seconds, la sortie des gaz et de l'air.Il branche donc par soudage, des tubes de cire pleins sur la sculpture, en respectant le principe des vases communicants.Puis il fixe des clous sur la sculpture pour maintenir le noyau en place quand la cire sera fondue.Au sommet du montage du réseau, on adapte une coupe en forme d'entonnoir, appelée goulotte ou bouche d'alimentation, dans laquelle sera versé le métal en fusion.

La "potée" et sa cuisson

L'ensemble cire-sur-son-noyau et le réseau d'alimentation et d'évents, est enterré dans une matière réfractaire (la même que pour le noyau), qu l'on appelle "potée".Cette potée ressemble à un cylindre, duquel dépasse l'extrémité de la goulotte et des évents. Puis celle-ci est placée dans un four de décirage, qui dans une première phase d'étuvage. La température est alors augmentée progressivement jusqu'à environ 650 degrés, pour pyroliser la cire, qui doit disparaître après être passée par différents états (c'est de là que vient le nom de "bronze à la cire perdue"). La totalité de la cuisson peut durer plusieurs jours en fonction de la taille des potées.

La coulée

La potée cuite est retirée du four et enterrée dans du sable afin de la préserver des risques d'éclatement au cours de la coulée du bronze. Pendant cette opération, les lingots de bronze sont mis à fondre dans un creuset, placé à l'intérieur du four de fusion.

Enfin, quand le métal est en température, c'est-à-dire à environ 1100 degrés, il est versé dans la goulotte et le bronze liquéfié s'immisce dans tous les creux à l'intérieur de la potée qui ont été ménagés par la cire que nous avons fait disparaître. la température du métal en fusion est si élevée qu'elle provoque une importante dilatation de l'air. Il faut que cet air puisse s'échapper le plus facilement possible, d'ou l'utilisation des évents, dont nous avons parlé précédemment.

Le décochage

La potée refroidie est retirée du sable et à l'aide d'un piolet, elle est cassée pour mettre à jour le bronze brut, qui comprend la sculpture et tout le réseau d'alimentation et d'évents désormais en bronze. L'émotion est à son comble pour le fondeur

La finition

On procède alors aux opérations suivantes: ébarbage (suppression des jets et évents), débouchage (vidage du noyau), rebouchage des trous laissés par les clous, assemblage, brasage, ciselage, polissage.

La patine

la sculpture de bronze nue est patinée en appliquant des produits chimiques sur la pièce chaude. On obtient ainsi diverses couleurs selon les produits utilisés.

Il faut savoir qu'il existe une réglementation en matière de bronze. Un bronze est une oeuvre d'art originale si elle est tirée au maximum en huit exemplaires numérotés(1/8,2/8...), plus quatre épreuves d'artiste numérotées (EA 1/', EA 2/4...). L'artiste et le fondeur se réunissent lorsque le dernier tirage aura été réalisé, afin de détruire le moule original. La sculpture est numérotée, signée par l'artiste et le fondeur. Au-delà de douze, ce sont des oeuvres d'édition.

 

R. Vezin 

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